Sans nuit, sans vie ?

« Jamais je ne vis de nuits plus sidérales et plus touffues que ce printemps ouÌ€ les arbres des boulevards sont comme les ombres du ciel. »
(Blaise Cendrars, Au coeur du monde, 1924-29)

Les nuits sidérales chantées par Blaise Cendrars résonnent comme l’écho lointain d’un temps révolu. Car la nuit absolue, telle qu’elle régnait encore tout preÌ€s de Paris avant l’aveÌ€nement, aÌ€ la fin du 19e sieÌ€cle, de la Fée Électricité, a disparu. « Nous laissera-t-on un ciel aÌ€ observer ? », demandaient déjaÌ€ les astronomes amateurs presque 100 années plus tard. Aujourd’hui la Voie lactée n’est plus visible pour plus d’un tiers de l’humanité. 83 % de la population mondiale vit sous un ciel entaché de pollution lumineuse. On connaiÌ‚t désormais les effets négatifs de la lumieÌ€re artificielle sur l’environnement (érosion de la biodiversité) et sur la santé (rythmes biologiques et fonctions physiologiques: troubles de l’horloge interne, influence de la mélatonine sur le développement de certains cancers). Pensé initialement pour diminuer l’insécurité nocturne (ce que contredisent de récentes études), l’éclairage public sert également d’autres intéreÌ‚ts. Car apreÌ€s tout, selon le géographe Samuel Challéat*, les intérêts des éclairagistes ne sont pas d’installer de l’obscurité : ils veulent installer des lumieÌ€res…

* Samuel Challéat, Sauver la nuit, Premier Parallèle, 2019

Partager :

Auteur :

Retour en haut